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En avant-propos, un message apparait essentiel concernant la question des paraphilies :
Personne n’est responsable de ses fantasmes, et aucun fantasme n’est puni par la loi. En revanche chaque individu est responsable de ses actes !
De même :
La majorité des personnes présentant des fantasmes paraphiliques ne passera jamais à l’acte et tout acte sexuel pouvant être considéré comme déviant n’est pas nécessairement causé par une paraphilie.
L’étymologie du terme « paraphilie » est composée de « para » : à coté de et « philos » : amour . Les paraphilies regroupent l’ensemble des sexualités dites déviantes quant à leur objet de fantasmes (exemples : enfants, objets inanimés…) et/ou leur objectif (exemple : entraîner la souffrance d’autrui). Celles-ci doivent présenter un caractère répétitif.
Une personne présente une paraphilie lorsqu’elle a des fantasmes entraînant une excitation sexuelle intense et récurrente et/ou des pulsions sexuelles et/ou des comportements impliquant une activité sexuelle paraphilique pendant au moins 6 mois. Le Manuel Diagnostique et Statistique des troubles mentaux, 5e version (DSM V, manuel de psychiatrie qui sert de références au niveau mondial à tous les psychiatres et autres professionnels de santé) ) fait ensuite la distinction entre une paraphilie qui entraînerait ou non des conséquences.
Une paraphilie peut donc :
- générer une détresse ou une altération du fonctionnement quotidien de l’individu (difficultés dans les relations sociales, professionnelles…) sans préjudice personnel (judiciarisation) ou pour d’autres personnes (passage à l’acte) ;
- créer un préjudice personnel ou pour d’autres personnes sans entraîner de détresse ou d’altération du fonctionnement chez l’individu ;
- créer une détresse, une altération du fonctionnement et un préjudice personnel ou pour autrui ;
- ne pas entraîner de conséquences, ce qui est plus rare.
Les différentes paraphilies
Dans ce site ne sont décrites que les 8 paraphilies recensées dans le DSM. Il en existe cependant beaucoup plus. Cette sélection s’est faite sur deux critères :
- elles sont relativement courantes par rapport aux autres paraphilies,
- certaines d’entre elles, pour être satisfaites, entraînent des actions qui, par leur caractère nocif peuvent potentiellement porter préjudice à quelqu’un et seront donc considérées comme délictuelles ou criminelles.
Pour rappel, elles ont toutes en commun la nécessité d’être présentes depuis au moins 6 mois.
Pédophilie
Sont considérés comme pédophiles les adolescents ou les adultes qui se sentent attirés sexuellement par des enfants qui n’ont pas atteint la puberté (voir article dédié sur notre site).
Voyeurisme
Il implique un plaisir sexuel obtenu en observant des individus à leur insu dans leurs relations intimes comme par exemple lorsque la personne prend sa douche, se déshabille ou a des relations sexuelles.
Exhibitionnisme
Il implique le fait d’obtenir du plaisir en s’exhibant en public, notamment en montrant ses organes génitaux ou en s’affichant lors d’une relation sexuelle dans des lieux non prévus à cet effet.
Frotteurisme
Il implique une excitation sexuelle obtenue par frottement contre des personnes non consentantes.
Masochisme sexuel
Il implique un plaisir obtenu en subissant de la douleur ou de l’humiliation.
Sadisme sexuel
Il implique un plaisir obtenu en infligeant de la douleur ou de l’humiliation.
Fétichisme
Il implique un plaisir obtenu par le fait d’utiliser des objets non sexuels ou des parties du corps d’une personne habituellement considérées comme non érotiques pour obtenir une excitation sexuelle. Les exemples les plus connus du grand public étant les chaussures, les pieds, etc.
Transvestisme
Il implique un plaisir sexuel obtenu par le fait de porter les vêtements du sexe opposé.
Les paraphilies peuvent débuter à l’adolescence ou à l’âge adulte et leur expression peut être fluctuante au cours de la vie. Elles peuvent s’exprimer systématiquement dans la sexualité de la personne ou de manière plus épisodique. L’évolution est en générale chronique.
Diagnostic différentiel
Certaines pathologies peuvent être confondues au premier abord car elles peuvent apparaître proches. Le diagnostic différentiel -qui ne peut être établi que par un professionnel de santé- est celui qui va permettre de poser le diagnostic définitif en éliminant les maladies dont les symptômes pourraient paraître similaires. Les paraphilies sont à distinguer des troubles cités ci-dessous :
L’addiction sexuelle : en général l’objet du désir sexuel n’est pas déviant. Le diagnostic différentiel reste complexe car il peut exister à la fois une paraphilie et une addiction sexuelle (voir article dédié sur le site).
Le trouble obsessionnel compulsif : nous avons fait le choix ici de le développer dans la rubrique concernant la pédophilie car ce diagnostic différentiel se présente plus fréquemment pour cette paraphilie.
Distinction entre la clinique psychiatrique et la condamnation judiciaire
Les classifications psychiatriques et judiciaires sont différentes.
Certaines paraphilies n’entraînent pas de conséquences judiciaires, comme le fétichisme ou le transvestisme.
D’autres peuvent entraîner des conséquences judiciaires dès lors que la paraphilie conduit à un passage à l’acte délictuel ou criminel. Ainsi, une personne ne peut être condamnée pour pédophilie. En effet cette dénomination renvoie à une classification psychiatrique et non judiciaire. De plus, une personne présentant une pédophilie peut ressentir une détresse par rapport à cette problématique, sans avoir eu des comportements délictuels ou criminels en lien avec celle-ci (pas de visualisation/détention de vidéos pédopornographiques, d’agressions sexuelles ou de viols).
Comment venir consulter ?
La fédération française des C.R.I.A.V.S. (Centres Ressources pour les Intervenants auprès des Auteurs de Violences Sexuelles) propose un dispositif d’écoute et d’orientation (R.E.O.) sur une grande partie du territoire pour les individus présentant des paraphilies et/ou des comportements sexuels transgressifs (plus d’informations sur : www.ffcriavs.org/la-federation/reseau-ecoute-orientation/).
Lorsque l’on ressent des difficultés dans sa sexualité, il est également possible de venir consulter un psychologue ou un psychiatre. Ceci peut se faire auprès d’un professionnel en libéral ou dans le Centre Médico-Psychologique (CMP) près de chez vous.
L’évolution des troubles étant en général chronique, une prise en charge est importante.
Tous les soignants sont-ils à même de prendre en charge ces problématiques ?
Oui, tous les soignants sont à même de prendre en charge ces problématiques, tout en respectant les modalités du secret professionnel. En cas de difficultés, dans chaque région le C.R.I.A.V.S. (ou C.R.A.V.S.) peut être sollicité à titre consultatif par l’équipe soignante ; l’équipe de soins pourra ainsi proposer une prise en charge davantage adaptée au patient.
Modalités de prises en charge :
Où peut-on être pris en charge pour ces problématiques ?
- En milieu ouvert (CMP, psychiatre libéral,psychologue libéral) à la demande du patient. La consultation spontanée est alors motivée par la détresse ressentie et/ou les problèmes que la paraphilie engendre pour l’entourage ;
- En milieu ouvert, dans le cadre de soins pénalement ordonnés suite à une condamnation (obligations ou injonctions de soins) ;
- En détention, lorsque les personnes présentant une paraphilie ont été condamnées pour des faits commis en lien ou non avec une paraphilie.
Thérapies proposées
Les objectifs définis en début de thérapie sont souvent de pouvoir contrôler les fantasmes et les comportements paraphiliques et de penser autrement sa sexualité afin de pouvoir s’y épanouir de façon adaptée.
Les différentes thérapies proposées sont multiples et dépendent de nombreux critères : type de paraphilie, lieu de consultation, pratiques et formations des professionnels, etc.
Nous pourrons ici citer quelques grands axes de prise en charge :
- Les psychothérapies : Thérapies Cognitivo Comportementales (T.C.C.), thérapies d’inspiration psychodynamique, prise en charge sexologique… Elles peuvent être proposées sous forme individuelle ou groupale.
- Médicamenteuse : les traitements d’aide à la maîtrise pulsionnelle. Il existe plusieurs traitements disponibles, dont les indications restent très précises et limitées. On notera certains antidépresseurs à posologie élevée qui peuvent limiter la dimension compulsive et la libido ou l’hormonothérapie, appelée dans le langage courant « castration chimique ». Ce terme en donne une image faussée. En effet, le terme de « castration » renvoie à une destruction totale des organes reproducteurs si l’on prend la définition courante, ce qui n’est pas le cas de ces traitements dont les effets sont réversibles. De plus, il est important de noter que l’indication pour de tels traitements concerne peu de personnes et nécessite un bilan somatique. Bien sûr, ils ne peuvent être prescrits sans l’accord du patient.
En conclusion
L’évolution des troubles étant en général chronique, une prise en charge présente un réel intérêt pour la personne souffrant de paraphilie et pour son entourage. Elle peut permettre de diminuer les conséquences de cette dernière et de sortir de l’isolement qu’entraîne bien souvent cette problématique.
Tout comme le personnage de Gilles de Rais qui va nous servir de guide tout au long de ce livre, la violence fascine et effraie à la fois. La maladie mentale, elle aussi nous trouble et nous dérange. Serait-il possible que ces malades, que nous ne connaissons et donc ne comprenons pas, puissent être dangereux pour nous et pour eux-mêmes ? L’amalgame entre violence et pathologie mentale est encore trop fréquent. Et les malades pointés du doigt. Ces préjugés sont lourds à porter et durs à combattre. Ils stigmatisent et isolent plus encore les personnes souffrant de maladies psychiques.
Dans ce nouveau livre de la collection Savoir pour guérir, un psychiatre va essayer de répondre aux questions que l’on peut se poser sur les relations entre violence et maladies mentales. Certains passages à l’acte sont-ils associés à des maladies psychiques, physiques, ou bien à des troubles de la personnalité ? Que nous apprend la psychiatrie sur les comportements pervers et les paraphilies ? Et que peut faire le psychiatre pour nous aider à comprendre et à prévenir la violence physique et psychique ? Telles sont les questions que Jean-Baptiste Causin va aborder avec nous dans son ouvrage.